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Élections législatives 2022, note d'information

Une majorité relative et de fortes oppositions

Les élections législatives en France placent le gouvernement dans une situation nettement plus précaire que précédemment. Désormais sans majorité absolue (289 alors que le parti présidentiel et ses alliés comptent aujourd’hui 245 sièges versus 306 précédemment) et avec une présidence de la commission des finances qui va lui échapper, il devra chercher des compromis et des alliances au gré des événements, ce qui va rendre le processus législatif plus long et plus incertain, en particulier pour les réformes peu populaires.

Dans un contexte de durcissement des conditions financières, cela risque d’avoir des conséquences sur le spread de taux souverains entre la France et l’Allemagne. La capacité du gouvernement à répondre aux urgences économiques risque également d’être mise à mal alors que la crise énergétique s’aggrave. La décision de la Russie de couper plus encore l’approvisionnement en gaz complique grandement la reconstitution des stocks en vue de l’hiver. Si la France n’a pas réagi, l’Allemagne a annoncé hier relancer ses centrales à charbon et préparer des mesures de rationnement, notamment pour l’industrie, ce qui constituera un frein important à la reprise économique et laisse craindre une croissance très faible au cours des prochains trimestres.

Une Assemblée nationale fragmentée en France

Les élections législatives françaises n’ont pas permis de constituer une majorité absolue à l’Assemblée nationale, en particulier pour la coalition présidentielle «Ensemble». Plusieurs forces d’opposition ont émergé à l’issue du second tour des élections législatives hier soir avec 142 sièges pour l’alliance de gauche (NUPES), 89 sièges pour le Rassemblement national, 64 sièges pour Les Républicains (LR) et l’UDI, et 13 sièges pour les divers gauche. L’écart pour une majorité absolue est de taille pour Emmanuel Macron et le gouvernement qui devront nécessairement trouver des alliances au Parlement pour valider les textes de loi ces prochains mois afin d’éviter que le pays se retrouve en état de paralysie politique. La probabilité d’une absence de majorité absolue semble cependant avoir été en partie intégrée dans la faiblesse récente de l’euro face au dollar qui n’évoluait que peu lundi matin tout comme les taux souverains français qui s’écartaient très légèrement avec ceux allemands (+3 points de base sur le spread à 10 ans). La monnaie unique pourrait toutefois être pénalisée davantage par le risque de blocage politique, qui continuera également de soutenir une prime de risque sur les obligations souveraines françaises, maintenant le spread de taux souverains avec l’Allemagne à un niveau plus élevé (autour de 50 points de base selon nous).

La possibilité de signer un accord de législature avec un groupe afin de garantir une majorité absolue a été évoquée, avec LR notamment, mais le chef du parti, Christian Jacob, s’y est opposé à ce stade. Deux options principales restent donc sur la table pour gouverner ces prochains mois : construire des majorités « au cas par cas » en fonction des projets de loi ou passer certains textes via l’article 49.3 de la Constitution (adoption d’un projet de loi sans vote à l’Assemblée). Rappelons toutefois que cette procédure est limitée : 1 - au projet de loi de finances et au projet de financement de la sécurité sociale, et 2 - pour les autres projets de loi en débat à l’Assemblée nationale, elle ne peut être utilisée qu’une seule fois par session parlementaire (d’octobre à juin). Là encore, la tâche pourrait s’avérer difficile pour le gouvernement si les partis d’opposition s’entendent pour valider une motion de censure (déposée par au moins 58 députés et validée à la majorité absolue) afin de bloquer l’article 49.3 ou forcer le gouvernement à démissionner.

En dernier recours, Emmanuel Macron pourrait dissoudre l’Assemblée nationale grâce à l’article 12 de la Constitution, une option qui est d’ores et déjà évoquée au sein de l’exécutif à un horizon d’un an. Plusieurs critères doivent être respectés : les élections législatives doivent avoir lieu entre 20 à 40 jours après l’annonce, et aucune autre dissolution ne peut avoir lieu dans l’année qui suit. Notons cependant que la question du délai à respecter pour dissoudre l’Assemblée nationale pose débat aujourd’hui parmi les constitutionnalistes. Dans tous les cas, Emmanuel Macron devra s’assurer qu’il n’essuiera pas un échec dans le cas d’une dissolution avec un nouveau vote défavorable de la part des Français.

La situation qui se dessine risque donc de jouer négativement sur les perspectives. Alors que l’économie est en plein ralentissement du fait de l’inflation et des problématiques des chaines d’approvisionnement, un soutien budgétaire reste nécessaire pour réduire le choc pour le pouvoir d’achat et limiter les faillites d’entreprises. Si aucun compromis n’émerge entre les différents partis, le ralentissement pourrait être un cran plus marqué qu’attendu.

Achevé de rédiger le 20 juin 2022 par Crédit Mutuel Investment Managers.

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